Contexte / Enjeux

Si a mise en œuvre de cette pratique est parfois délicate sur le terrain, les couverts végétaux peuvent apporter de multiples bénéfices à l’agriculture, la société et l’environnement et sont voués à se développer en agriculture.

Que ce soit en mode de production bio ou conventionnel, les couverts végétaux, bien insérés dans les stratégies, contribuent à l’amélioration de la durabilité et aux performances des agrosystèmes.

  • Comment est travaillée et évaluée la pratique des couverts végétaux par les Instituts techniques agricoles ?
  • Quelles sont les conditions de réussite de mise en œuvre de cette pratique auprès des producteurs ?
  • Où trouver les ressources sur les plantes de services ?

Les couverts végétaux fournissent des services écosystémiques, cependant la complexité des interactions entre la biodiversité et les pratiques agricoles rend nécessaire leur évaluation. Cette expertise est développée au sein des instituts techniques agricoles qui accompagnent les agriculteurs vers plus de durabilité et de performances de leur agrosystème.

Plus de 260 ressources relatives aux couverts végétaux applicables en bio et produites par les instituts techniques agricoles on été collectées dans la dynamique du programme Synergies Bio et Non Bio co-pilotée par l’Acta et l’ITAB.

Ces ressources sont accessibles depuis l’espace thématique « Mobiliser les plantes de services » au sein de la plateforme web GECO de la Cellule RIT (Recherche – Innovation – Transfert) portée par l’Acta.

Les ressources sont structurées sous forme de fiches techniques opérationnelles et de retours d’expériences (témoignages d’agriculteurs, résultats d’expérimentations), classés en 4 rubriques : Découvrir, Comprendre, Mettre en pratique et S’inspirer.

Quelques exemples de travaux de R&D des instituts techniques agricoles sur les couverts végétaux issues d’une récente plaquette sont ci-après exposés.

©Arvalis Réponses aux évolutions climatiques par l'innovation et les techniques alternatives dans les lavanderaies (projet RECITAL)
©Iteipmai Réponses aux évolutions climatiques par l'innovation et les techniques alternatives dans les lavanderaies (projet RECITAL)

Les multiservices rendus par les couverts végétaux à l’étude

Les couverts végétaux s’insèrent dans les stratégies de diversification des cultures et génèrent des services multiples bénéfiques à l’agriculture, la société et l’environnement : fertilité des sols, régulation de l’eau et du climat, préservation de la biodiversité et des paysages, diversification des revenus … Les travaux des instituts techniques visent à évaluer l’efficacité de cette pratique.

Limiter les intrants, bénéficier des multiples services et atténuer les effets du changement climatique

ARVALIS développe une pratique pour gérer des couverts permanents de légumineuses en céréales sans herbicides (bio ou conventionnel) basée sur le principe de la gestion distincte de la culture de rente et du couvert dans l’espace et le temps.  Le projet GRAAL  teste la faisabilité de cette pratique et évalue les services rendus dans des conditions pédoclimatiques variées. Dans le projet BBSOCOUL, les interactions blé dur – luzerne sont étudiées afin de sélectionner les variétés adaptées à ce mode de gestion.

Iteipmai (projet RECITAL) a testé différents modes de gestion de couverts végétaux en lavanderaie pour sélectionner les modalités en inter-rang  les mieux adaptés et améliorer la résilience du système face aux stress climatiques et gérer les bioagresseurs et les adventices. L’appropriation des résultats intéressants montrent une forte progression des surfaces couvertes même si l’itinéraire traditionnel ‘inter-rag non couvert) reste majoritaire.

Le CTIFL (projet PlacoHB) a expérimenté divers couverts semés sur le rang en verger d’abricotiers bio notamment en comparaison avec des modes des gestion travail du sol et avec un couvert spontané. Comme aucun impact négatif n’a été décelé sur les rendements, calibre ou qualité, l’adoption des couverts en arboriculture peut être envisagé.

Les couverts végétaux, un moyen de reconnexion entre les productions animales et végétales aux multiples avantages.

Les instituts techniques conduisent des travaux sur la complémentarité « couverts végétaux et la production de ressources » pour l’élevage.

Idele-Institut de l’Élevage travaille depuis plusieurs années en partenariat avec les autres filières sur différents projets de R&D (Brebis_Link, Inter- AGIT+, Poscif, Sobriété, Glyphovin, ESPERE …) pour développer le pâturage des couverts au sein des territoires, et ainsi favoriser une nouvelle forme de polyculture élevage durable.

Itab-Lab, Bio Nouvelle-Aquitaine et Agrobio Gironde travaillent sur l’introduction de brebis dans les vignes en hiver pour réguler l’enherbement et améliorer la fertilité.

ITAVI mène des études sur l’aménagement des parcours avicoles (ombrage, couverts riches en légumineuses (projets RESIVOL, VALORAGE).

Le pâturage de ces couverts intra-parcellaire ou des intercultures offre des avantages intéressants : autonomie alimentaire, double valorisation des couverts, fertilité du sol, économies de carburant, gestion de l’enherbement, des maladies et ravageurs (notamment la limace), organisation et temps de travail, amélioration du bien-être des animaux, réponse aux attentes sociétales, … Cependant, malgré son essor, la mise en place de cette pratique pose encore des questions, et des améliorations restent à explorer.

Les principes fondateurs de l’agriculture biologique (AB) et la place des couverts végétaux. L’agriculture biologique telle que définie dans sa règlementation (règlement (UE) 2018/848) vise la protection de l’environnement (y compris l’eau et l’air) et du climat, la préservation de l’état et de la fertilité à long terme des sols et l’atteinte d’un niveau élevé de biodiversité dans un environnement non toxique. Elle se veut un système de gestion durable et responsable des ressources et des cycles naturels et du vivant, économe en intrants extérieurs ou non renouvelables.

Le recours à des couverts est évoqué, de façon explicite (par exemple les engrais verts) mais aussi de façon plus implicite par la nécessité de diversification des cultures, pour la gestion et la fertilisation du sol (en particulier lorsqu’ils incluent des légumineuses) ainsi que pour le soutien à sa vitalité. Leur participation à la richesse en matières organiques, à la stabilité du sol et à sa biodiversité ainsi qu’à la prévention du tassement et de l’érosion sont ainsi reconnus par le législateur.

En bio, la protection des plantes vis-à-vis des bioagresseurs, adventices comprises, est en priorité basée sur la prévention et s’appuie en premier ressort sur la rotation des cultures, la préservation des auxiliaires de culture, ou des pratiques culturales comme la biofumigation : trois leviers actionnables par des couverts végétaux.

Des couverts végétaux pour améliorer la fertilité des sols

Les couverts végétaux améliorent les apports de carbone et le maintien des nutriments dans les parcelles. Ils impactent aussi la structuration et les flux hydriques des sols. Ce faisant, ils renforcent la fertilité et atténuent la dégradation de la qualité des eaux et les effets du changement climatique.

Couvrir le sol pour l’enrichir en matières organiques et éviter les pertes de nutriments.

ARVALIS a montré que les couverts intermédiaires multi-services (CIMS) ont amélioré la régulation de l’eau, limité les pertes de nitrates et l’érosion, sans pénaliser les cultures suivantes (dans le cadre de sa participation au projet BAG’AGES). L’outil Simeos-AMG a montré la contribution des couverts au bilan humique en grandes cultures, par la production aérienne et racinaire de carbone organique retournée au sol. Des collaborations avec ARVALIS (coordinateur du projet AMG-LAB) sont menées avec Terres Inovia, l’Idele-Institut de l’Élevage et l’IFV, dont l’objectif vise à intégrer des systèmes bio et en agriculture de conservation des sols (ACS) en viticulture ainsi que les prairies.

Capter, fixer et restituer l’azote aux cultures : fertiliser avec les couverts.

L’IFV met en place, depuis une quinzaine d’années, des essais pour envisager une substitution partielle, voire totale, des engrais exogènes grâce à l’implantation d’engrais verts temporaires. Les essais confirment qu’avec certaines légumineuses, comme la féverole d’hiver, la fixation de l’azote et sa restitution pour alimenter les vignes est significative, sans pour autant affecter les rendements, la dynamique de minéralisation des matières organiques restituées aux sols étant lente et variable. En revanche, la vigueur des ceps est renforcée de façon significative ainsi que la teneur des moûts
en azote, une condition nécessaire à leur bonne fermentescibilité.

   En savoir plus

« Les couverts végétaux. Un atout majeur pour réduire les intrants de synthèse et augmenter les services écosystémiques au vignoble »

Revue des œnologues, N°175, avril 2020

“ Les Entretiens Vigne et Vin en Languedoc Roussillon – L’azote, de la vigne au chai ” 

Vignevin Occitanie 13 décembre 2024Vignevin Occitanie 13 décembre 2024

Le CTIFL s’est intéressé aux cinétiques de minéralisation qui renseignent la disponibilité de l’azote de couverts intermédiaires multiservices (CIMS) pour les cultures légumières (projet BAAMOS) et a été partenaire dans la publication d’un guide concernant les engrais verts pour la production légumière de la côte du nord de la Bretagne ( (choux, artichauts, poireaux…) et rassemblant les résultats d’essais menés en bio. Ces derniers éclairent l’impact positif des engrais verts sur la fertilité des sols et la nutrition des cultures.

Les couverts et la régulation des bioagresseurs : mieux comprendre les interactions entre biodiversité et pratiques agricoles pour mieux les gérer

Les couverts végétaux sont un levier agroécologique prometteur pour limiter
les bioagresseurs que sont les adventices et les ravageurs. Ils permettent sous conditions une régulation naturelle via la flore et la compétition, tout en renforçant la fertilité.
Les couverts constituent un levier complémentaire dans une stratégie de protection intégrée.

Explorer les effets démontrés sous conditions en gestion des adventices

l’ITAB a obtenu des résultats encourageants dans les dispositifs de longue durée RotAB. (projet Made in AB)

l’Iteipmai a identifié des couverts adaptés pour la production de menthe poivrée afin de limiter l’enherbement tout en évitant la concurrence excessive avec la culture de rente. (projet COCOSOL)

Terres Inovia teste des innovations agronomiques dans les systèmes de grandes cultures biologiques, comme le semis de légumineuses sous couvert de tournesol bio et a montré que dans certaines conditions, le semis tardif de luzerne (au dernier binage ou stade B4 du tournesol) permet un bon développement du couvert sans impacter le rendement du tournesol et apporte un gain d’azote pour le blé suivant.

Démultiplier l’effet des couverts par les approches collectives et territoriales

Terres Inovia conduit des actions coordonnées sur les Plateaux de Bourgogne avec un groupe d’agriculteurs pour atténuer les dégâts d’insectes sur grandes cultures (projet CONCERTO). Si les bénéfices des couverts sur la régulation des bioagresseurs sont avérés dans de nombreuses situations, leur adoption reste conditionnée par des freins sociotechniques

Les contributions de l’ITAB et du CTIFL dans le projet coordonné par INRAE (projet INTERLUDE) en maraîchage (Provence, Roussillon, Antilles), montrent l’importance de la co-construction des solutions avec les agriculteurs et les acteurs locaux. En identifiant collectivement les leviers et les freins, en s’appuyant sur des diagnostics partagés et des outils pédagogiques), il devient possible de lever progressivement les obstacles au changement.

Sud OuestNord Est

La délicate gestion des couverts végétaux

La maximisation des services écosystémiques attendus d’un couvert, repose sur la gestion stratégique, parfois délicate à mettre en œuvre, du choix des espèces et des pratiques, à adapter aux contextes variés de production, de conditions climatiques et règlementaires.

Expérimentations régionales pour améliorer l’implantation des couverts végétaux et les services attendus

L’ITAVI teste l’usage de différents couverts (projet PHACÉLIE) en héliciculture en région Avergne-Rhône-Alpes) pour réduire la mortalité des escargots et sécuriser une production durable. Des fiches techniques accompagneront les éleveurs, y compris en bio.

Dans le projet COUVIR, l’Iteipmai explore la piste des couverts permanents, en inter-rang de différentes PPAM en Pays de Loire. Les problématiques sont ici multiples : adaptation du matériel d’implantation et d’entretien des deux espèces associées (agriculture de précision), choix des couverts les plus couvrants mais les moins concurrentiels, obtention de résultats cohérents pour la rentabilité de l’itinéraire technique.

L’IFV a montré en viticulture l’importance de la précocité du semis des couverts et de la pluie après implantation pour la production de biomasse (projet RESAMOVITI)

Mélange de plantes de services, trèfles et phacélie, pour favoriser les auxiliaires, les pollinisateurs et couvrir le sol sur un rang de cerisier. © MERMET Simon
Essai de choix de couverts en héliciculture région Auvergne-Rhône-Alpes ©Alice Marchandeau - ITAVI
Culture de cardon & couvert de lotier. Le lotier se démarque par son développement lent, une reprise après broyage plus fournie, un port plus étalé et couvrant que celle du trèfle ©iteipmai

Outil d’aide à la décision « Choix des couverts » : l’OAD multicritère en grande culture et polyculture-élevage

Développé par ARVALIS et ses partenaires Terres Inovia, ITB, UNILET, ITSAP-Institut de l’abeille, Agrifaune Interculture),, il aide les agriculteurs à choisir  les couverts intermédiaires adaptés à leurs objectifs (apport d’azote, gestion adventices, valorisation fourragère…) et au contexte de production. Gratuit et en ligne, il fournit un classement des couverts et un accès direct aux fiches techniques.

Malgré les bénéfices potentiels des couverts végétaux, il existe des freins à leur adoption, notamment certains manques de connaissances actionnables, ce levier reste d’intérêt majeur.

Le prochain séminaire le 2 décembre 2025 propose de faire un état de l’art des connaissances et d’identifier les outils à développer pour une adoption plus large et optimiser les performances des couverts.